« LES DEUX GRANDS »
On aime terminer sa journée en regardant Ce soir (ou jamais !), émission que Frédéric Taddeï présente en direct après Soir 3.On aime suivre ces discussions consacrées à des sujets d’actualité avant de plonger dans les bras de Morphée.
Mais notre journaliste avisé se doutait-il que le propos éclairant de son émission du jeudi 13 décembre serait enrichi d’une cocasserie ?
En cette treizième soirée du mois il avait convié deux spécialistes pour un « Débat sur les changements climatiques depuis la nuit des temps » : Henry de Lumley et Emmanuel le Roy Ladurie. « Les deux grands » les présenta Taddeï avec ce respect qu’on témoigne aux savants d’exception. Le premier, tête haute, rayonnait de satisfaction et de fierté ; le second, tête baissée, comme s’il fixait la pointe de ses pieds, affichait une mine qui ressemblait plutôt à celle des mauvais jours. Procédant dans l’ordre chronologique, Taddeï interrogea d’abord Henry de Lumley sur les modifications climatiques dans la préhistoire. Habité par cette béatitude que procure une humiliation compensée, notre paléontologue offrit alors aux téléspectateurs quelques propos d’ordre général dont l’originalité dépassait rarement le cadre des banalités. Vint ensuite le tour d’Emmanuel Le Roy Ladurie pour les périodes historiques. Le regard toujours baissé, il présenta avec maîtrise un aperçu de ces modifications à travers les âges en commençant par l’époque néolithique ; aussi compléta-t-il avantageusement l’exposé de son collègue. Au fur et à mesure que l’émission avançait, l’écart entre les « deux grands » se creusait. Les performances de Le Roy Ladurie, nourries d’une érudition sans limites, doublées de réflexions philosophiques, formulées dans un esprit de synthèse, procuraient la possibilité aux téléspectateurs de jauger sur le vif la différence entre un grand authentique et un grand considéré comme tel. Ils ne furent pas les seuls. Malin authentique, Henry de Lumley évaluait, lui aussi, cette différence. Se faisant moins loquace, il limitait l’essentiel de ses interventions aux paraphrases de son collègue. En pleine conscience et reconnaissance car dès la deuxième elles étaient introduites par le même refrain : « Comme l’a dit Emmanuel Le Roy Ladurie». Alors que l’expression béate s’estompait, la langue se mit à lui foucher à force de ces répétitions : « Comme l’a dit Monsieur Durie » fit Henry de Lumley … pour la dernière fois car Frédéric Taddeï fit appel à la musique pour clôre cette discussion.
mardi 18 décembre 2007
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